Valls, la dernière cartouche

Publié le par Bernard LUSSET

J'ai écouté la déclaration de politique générale de Manuel Valls à l'Assemblée nationale. Autant le dire tout de suite, et à l'opposé des premières déclarations des leaders de l'opposition, j'ai apprécié ce discours, à double titre. Ce qui ne m'empêche pas de m'interroger sur la capacité de ce premier Ministre et son gouvernement de mettre en oeuvre les intentions affichées.

Derrière une déclaration de politique générale plutôt réussie, quelles suites données aux intentions ?

Derrière une déclaration de politique générale plutôt réussie, quelles suites données aux intentions ?

Un discours techniquement réussi

Je ne pense pas ici au ton un peu monocorde du premier Ministre, ce qui n'a d'ailleurs pas grande importance. Ce discours avait du souffle.

D'abord par la reconnaissance de l'échec cuisant des municipales. Vous me direz que Valls eût été ridicule à vouloir le minimiser ? Certes, mais quand même : cette manière d'accuser réception du message reçu avait du panache... J'en connais bien d'autres qui, au lendemain de leur échec électoral, égrènent leurs rancoeurs. Pas lui.

Techniquement réussi, ce discours l'était aussi, de mon point de vue, sur l'appel lancé, par delà les travées de l'Assemblée, à l'opposition. Il ne s'agissait pas de confusion des genres ni d'atténuer les différences mais plutôt d'une sorte d'union nationale autour d'un travail commun à accomplir. En éternel naïf que je suis, je veux espérer qu'il y avait, derrière l'aspect tactique du propos, une réelle volonté : on verra ça sous peu...

Réussi aussi ce discours qui renvoyait droite et gauche confondus aux échecs des majorités successives. Au-delà de l'habileté, il y avait là un fond de vérité qui n'échappe à personne : ni le chômage, ni la dette, ni les déficits ne sont l'apanage de ce seul gouvernement, même si la situation s'est beaucoup dégradée.

Plus encore que la déclaration initiale elle-même, la réponse du premier Ministre aux orateurs des groupes, en fin de séance, était forte et portait un style que j'ai trouvé, au fond, assez séduisant.

Enfin, de l'audace !

Réduction par 2 du nombre des régions, disparition des départements, suppression des cotisations patronales familiales, plan drastique d'économies publiques : vous vouliez un premier Ministre, le voilà ! En tout cas, la rupture de style avec Ayrault n'aura échappé à personne.

Bien sûr, derrière les annonces se cachent mille et une subtilités et quelques facilités. Bien sûr, le calendrier annoncé renvoit certaines échéances à des périodes post-présidentielles tellement lointaines...

Il n'empêche, on a eu droit à un chef de gouvernement inspiré, habité, donnant à croire qu'il était disposé, sous les réserves qui suivent, à bousculer le ron-ron républicain.

Ca change...

Manuel Valls a-t-il les moyens de sa politique ?

C'est là que tout se gâte...!

Qui détermine la politique du pays ? Le Président de la République. Que deviendront ces belles déclarations après être passées à la moulinette des arbitrages élyséens ? Personne n'en sait rien. D'autant que, pour être très clair, Hollande n'a aucun intérêt -aucun- à voir réussir ce possible concurrent de 2017...

Le (beau) score obtenu dans le vote de confiance des députés ne doit pas masquer une réalité : comme l'a justement dit François Sauvadet au nom des députés centristes, Valls est la "dernière cartouche" de F. Hollande. Le coup d'après, c'est la dissolution et cette perspective a sans doute contribué à remettre dans le droit vote les députés frondeurs du PS...

Mais quelle majorité, au fond, pour soutenir ce programme ? L'analyse du scrutin est parlante : les députés PS contraints au vote de confiance, à peine arrivés dans la salle des 4 colonnes, criaient à qui voulait l'entendre qu'au moment de l'examen des futurs textes, "on allait voir ce qu'on allait voir"... Le PC a, pour l'essentiel, voté contre la confiance, les Verts (comme d'habitude) ont dispersé leurs votes. L'opposition, elle, s'est très massivement opposée. Ca ne fait pas lourd pour soutenir le premier Ministre...

Passé ce moment de démocratie parlementaire, restent les Français. Ce sont eux, justement, qui ont peut-être en mains l'avenir de ce premier Ministre. Si (comme je le pense) les sondages des prochains jours créditent Manuel Valls d'un bon accueil de son discours par les citoyens, il se pourrait que sa majorité se sente contrainte de lui donner une petite chance d'avancer.

Sinon...

 

Publié dans on en parle partout

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A
J ai écouté attentivement son discours, j ai étais touché, mais est venu après les réactions des un et des autres, là,je me dit mais c est élue n ont rien comprit, la France à besoin de réel changement administratif, une réorganisation en profondeur, pour du mieux pour notre France, et on nous offre le spectacle de politique qui tire la couverture à eux qui veulent sauvé leur près carré, leur privilège tel la noblesse d antan, j étais prêt au efforts même si ma femme n à pas de boulot stable, je voulais bien passé à 3jour de carence, payé des impôts, etc etc mais toujours des retour en arrière en vue d être élue, cela me dégoûte ....
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D
Pour une fois Bernard, je ne partage pas ton analyse. Pour moi seul l'exercice de communication est une performance. Sur le contenu aucun point ne me font penser à un réel changement, car les mesures ne sont pas financer. Comment peut-on penser que les ministres d'hier qui sont les mêmes seront performants à leur nouvelles fonctions...J'ai l'impression que l'on nous prend pour des imbéciles. Comment peut-on basculer du budget à l'intérieur, de la consommation à l'éducation nationale, de rien à l'industrie, ect...Pourquoi ne pas avoir mis un grand patron de l'industrie au ministère du travail, un grand juge à la justice, un grand professeur de médecine à la santé, un grand commissaire à l'intérieur, etc... Moi j'étais au Ministère de la Défense et les généraux qui me diriger étaient tous des X + Sup aéro et nous pouvions parler d'aéronautique. Je n'accorde plus de crédit au PS. Amicalement MD
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B
Cher ami, tu n'es pas seul à penser ça et peut être même as tu raison... Ceci dit, le fait de douter (et je doute, moi aussi, cf la 3ème partie de la chronique) n'interdit pas d'espérer. Car sinon, je le crains, nous irons dans le mur.<br /> Je continue de penser que le discours avait "de la gueule" et du souffle. L'action qui suivra en aura-t-elle aussi ? A suivre...