Professions libérales : le raz-le-bol
Ce 30 septembre est la journée nationale d'action des professions libérales, à laquelle je m'associe de tout cœur par la pensée et dont j'approuve pleinement les mots d'ordre. Qu'il me soit permis ici d'expliquer un peu ce qui se passe.
Derrière l'image de nantis...
Professions libérales : medecins, avocats, notaires, agents d'assurance, pharmaciens. Difficile de faire pleurer Margot sur ces métiers, n'est-ce pas ? Ces professions libérales auront du mal à susciter l'empathie des Français tant est collée à notre peau l'image de nantis, vivant grassement, enkystés dans de vieilles habitudes et rétifs à tout changement.
Derrière l'image d'Epinal, se cache pourtant une toute autre réalité : les professions libérales (mais aussi commerçants et artisans, bref tout le monde des "indépendants") sont confrontées à un terrible effet ciseau : d'un côté, on leur reproche leur niveau de vie et leur volonté de préserver leur pré carré. De l'autre, on les soumet à une règlementation chaque jour plus contraignante -et couteuse- et à une pression fiscale et sociale difficilement concevable : nous sommes le coeur de cette France moyenne dans le portefeuille de laquelle l'Etat ne manque jamais de piocher toujours plus pour satisfaire ses besoins croissants. Cochons de payeurs...
Individualistes immodérés
Il n'y a absolument aucune chance que le mouvement de ce jour dégénère : les "indépendants" sont furieusement individualistes, chacun étant confronté à des difficultés spécifiques : le gouvernement peut donc dormir sur ses deux oreilles...
Avant que médécins, avocats, commerçants et agents d'assurance opèrent la "grande jonction" revendicative, il se passera du temps ! Pourtant, nous sommes -tous- confrontés aux mêmes difficultés : tirés à vue comme des lapins sur le plan fiscal, nous sommes sommés de mettre en oeuvre des règlementations de plus en plus contraignantes et ridicules et, dans le même temps, on nous accuse d'un conservatisme de bon aloi qui nous transforme en pigeons d'argile. Cibles idéales...
Un modèle de société
Et pourtant, loin de ces images d'Epinal, les indépendants défendent, outre leurs propres intérêts, un modèle d'organisation sociale qui mérite mieux que le mépris des petits marquis parisiens qui nous gouvernent : les commerçants, artisans et professions libérales constituent un réseau local, un tissu de proximité qui assure à leurs clients compétence, humanité et proximité. Le tout, à un coût inégalé : les risques, c'est nous, et nous seuls, qui les prenons !
Sommes-nous tous remplaçables par l'internet ? Oui, presque tous. Mais pour quelle vie ? Pour quelle société ? Beaucoup des situations rencontrées par nos clients pourraient, en effet, trouver réponse 24h/24 sur un site internet + carte bleue. Et les professionnels que nous sommes doivent savoir l'entendre et s'y adapter.
Mais au-delà des statistiques, nos cabinets, nos magasins, nos études reçoivent chaque jour mille et une situations hors norme, entendent chaque jour quantité de détresses, examinent quantité de situations imprévues qui requièrent un traitement différencié : là est notre raison d'être, sauf à abandonner notre modèle de société.
Des entrepreneurs
Nous ne sommes pas des chefs d'entreprise : trop petits, trop "services", pas assez "industrie", "nouvelles technologies". On veut faire de nous des dinosaures. Pourtant, chacun pris individuellement, il est frappant de constater que les mêmes marquis parisiens qui promettent notre fin ont pour l'essentiel recours à nous au quotidien, dans leur quotidien personnel...
Cette France des petits entrepreneurs est aujourd'hui à bout de souffle, inquiète de son avenir, machée de ce procès perpétuel qui lui est fait, et toujours plus fragilisée financièrement du fait des ponctions en tous genres qui affectent nos comptes d'exploitation.
Il n'y a aucun chance -aucune- pour que ce gouvernement d'incapables, d'amateurs, d'idéologues change son fusil d'épaule.
Mais l'opposition a grand intérêt à écouter ce petit peuple qui travaille : à ce que j'entends au quotidien, mes frères indépendants, exaspérés, sont tout près, tout près, de céder aux sirènes des démagogues qui se présentent à eux.
Fasse la raison que ce message soit entendu. Sinon, les difficultés sont devant nous...