Montpellier, pour un nouveau départ ?

Publié le par Bernard LUSSET

29 des 30 pays les plus jeunes au monde sont en Afrique. On dit souvent que cette jeunesse est un des plus grands atouts du continent ; c'est sans doute en effet une richesse sans pareil, surtout si on la compare au vieillissement généralisé de tous les pays du nord, Chine comprise. Mais encore faut-il que cette jeunesse trouve en Afrique les conditions de son épanouissement.

Or l'accès à l'éducation, aux soins, aux transports ou à l'emploi par exemple y sont infiniment difficiles. Cette jeunesse africaine espère aussi une meilleure vie démocratique et une plus grande liberté pour entreprendre, construire sa vie, s'exprimer sans entrave et construire son destin. Plus encore peut-être, cette jeunesse africaine est porteuse d'une énorme envie de fierté, de dignité, de patriotisme national ou continental. Car elle vit comme un scandale -et c'en est un- la corruption qui gangrène encore trop de responsables publics africains, comme une indignité la dépendance de certains de ses dirigeants à l'égard des pays du nord et comme une honte l'absence d'efficacité de nombreuses politiques publiques malgré l'argent investi.

Pour ces raisons, cette jeunesse africaine est un formidable réservoir d'énergies sur lequel les partenariats publics et privés internationaux qui convergent vers l'Afrique doivent s'appuyer davantage pour débattre du bien-fondé des projets à engager et garantir la plus grande transparence de leur réalisation.

On n'écrit pas l'histoire uniquement par le soupçon

Achille Mbembe

Enjamber les institutions étatiques pour dialoguer avec les Africains eux-mêmes et d'abord les plus jeunes : tel est bien l'objectif du sommet Afrique-France 2021 qui, pour une fois, ne réunira pas des chefs d'Etat africains mais des représentants de la société civile et un grand nombre d'intellectuels. Tous ont accepté de mener, sans complaisance ni hostilité militante, un long travail de réflexion collective dont les résultats seront présentés au Sommet de Montpellier le 8 octobre prochain. Cette restitution sera portée par Achille MBembe qui est un politologue camerounais reconnu pour ses travaux et son franc-parler.

Il faut saluer les acteurs de ce rendez-vous : le Président français d'abord, qui a suscité cette initiative et sera présent pour engager un débat public sans tabou sur ces bases. Mais aussi Achille Mbembe et ses collègues qui, pour avoir eu le courage d'accepter de participer à ces travaux, ont immédiatement été accusés de "trahir la cause" par les plus radicaux des militants panafricains.

Or, comme le dit Mbembe : "Il y a une brèche qui s’ouvre, il y a une chance qui est là. Il faut savoir la saisir et faire bouger les lignes. J’en suis convaincu, oui. Cela ne fait pas de moi un Macroniste, mais c’est quelqu’un avec lequel on peut discuter." Après la leçon afghane reçue par les grandes puissances à Kaboul (lire ici ma chronique sur le sujet), ce rendez-vous de Montpellier pourrait donc, peut-être, marquer l'avènement d'un partenariat nouveau entre pays riches et pays émergents, dans lequel les populations africaines trouveraient enfin des motifs sérieux d'espérance, de dignité et de souveraineté.

Publié dans on en parle en Afrique

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