Petite chronique de la présidentielle (3)
Candidats. Eric Zemmour a donc rejoint la cohorte des candidats déclarés pour la présidentielle. C'est peu dire que sa communication n'a plu qu'à ses aficionados les plus inconditionnels : ce ne sont ni sa vidéo ridicule "façon 18 juin" ni ses jérémiades après son intervention ratée sur TF1 qui vont susciter un rassemblement large autour de lui. Il lui reste encore une chance d'exister dans cette campagne : réussir son meeting de lancement à Villepinte. Sinon, il aura droit à un score à la Poutou.
Candidat à sa ré-élection. Avec les fêtes de fin d'année, le contexte sanitaire et la présidence française de l'UE au 1er semestre 2022, Emmanuel Macron n'est pas près d'annoncer sa candidature, dont nul ne doute d'ailleurs. En pareille circonstance, Jacques Chirac ne s'était dévoilé que le 11 février en 2002, depuis Avignon. Dix ans plus tard, Nicolas Sarkozy l'avait fait le 15 février au JT de TF1. Avant eux, Giscard avait attendu le 2 mars en 1981 pour s'exprimer et François Mitterrand avait même fait durer le vrai-faux suspens de sa candidature jusqu'au 22 mars, en 1988. Mais tous ces précédents n'empêcheront sans doute pas les opposants de crier au scandale en 2022 contre le Président-candidat-pas-encore-déclaré.
Favori ? Les intentions de vote en faveur d'Emmanuel Macron sont d'une étonnante stabilité, aux alentours de 24 %. Ces sondages ont-ils un caractère prédictif ? Rien n'est moins sur : les scrutins précédents ont tous réservé quelques surprises, la dernière étant Emmanuel Macron lui-même en 2017. Mais si le challenger d'alors a bénéficié d'un improbable alignement de planètes, il n'en sera pas de même du Président sortant en 2022 : il lui faudra incarner autre chose qu'une simple continuité tout en assumant un bilan qui, sans être à la hauteur des espérances de 2017, n'est pas déshonorant. Emmanuel Macron n'est pas si favori que ça à bien y réfléchir et sa meilleure chance reste la division de ses adversaires. Et là, il a plutôt un boulevard. Pour l'instant.
Fabien Roussel : la bonne nouvelle à gauche ? Voilà plusieurs fois que j'entends le candidat communiste s'exprimer. J'ai beau n'avoir aucune envie de voter pour lui ni partager ses idées, j'écoute avec intérêt ses prises de paroles : il porte un vrai discours politique et un projet de société cohérent. Il refuse par ailleurs de se laisser enfermer dans le petit jeu réducteur des petites phrases. Fabien Roussel paie sans doute cher en notoriété et en intentions de vote sa posture, mais ça fait du bien à entendre dans un débat électoral pour l'instant assez décevant. Et puis ça change agréablement d'une Hidalgo à la ramasse ou d'un Mélenchon décati, qui se pensent pourtant tous les deux indispensables à l'avenir de la gauche.
Encore une "nouvelle UDF" ? Le lancement ce week-end de "Ensemble citoyens !" me fait furieusement penser à feu l'UDF, comme un mammouth politique qu'on aurait extrait du pergélisol de la Vème République. Officiellement, la nouvelle maison commune de la majorité présidentielle n'est pas un parti et chaque composante y conserverait ses droits pléniers : comme l'UDF au début. Chaque composante a pourtant de solides ambitions de conquête de circonscriptions législatives : comme à l'UDF. Dans l'immédiat, pas d'adhésion possible à "Ensemble citoyens !" mais des adhésions directes devraient rapidement être ouvertes : comme l'UDF. Qui en sera le nouveau Giscard ? L'histoire ne le dit pas encore même si, l'âge aidant, Edouard Philippe (51 ans) semble mieux placé que François Bayrou (70 ans) pour évoquer les perspectives d'avenir. A supposer qu' "Ensemble citoyens !" en ait un.
Réussite. On saura à la fin de cette semaine qui des 5 prétendants aura obtenu le vote majoritaire des adhérents Les Républicains. Le calendrier et les modalités de cette primaire en auront fait rigoler plus d'un mais la suite met plutôt, a posteriori, les rieurs du côté de Christian Jacob, le Président LR : le parti a retrouvé un vivier inespéré d'adhérents, le risque d'exposition publique des divisions internes a été habilement déjoué, Bertrand et Pécresse ont été contraints de rentrer au bercail, les différentes sensibilités de la famille ont pu s'exprimer dans un climat respectueux et le gagnant de la primaire pourra se prévaloir d'une équipe honorable, rassemblée autour de lui. Ce n'était pas gagné d'avance.