A propos du Front national
On a sans doute pas fini de parler du Front national et de sa nouvelle présidente d'ici à la prochaine élection présidentielle de 2012...
Le sondage LHI qui la donne en tête à l'issue du 1er tour n'est sans doute pas le dernier et les commentaires vont aller bon train sur les 21 avril "à l'envers" ou "à l'endroit" qui hantent, déjà, les états-majors des partis politiques. Quel comportement en cas de triangulaire au second tour ? Comment endiguer la montée de ce vote protestataire ? etc.. Les apprentis sorciers de tous poils vont consciencieusement continuer de se griller au soleil du FN, comme si l'émergence politique et médiatique d'un membre du clan Le Pen était une nouveauté chez nous !
L'essentiel est ailleurs, comme toujours : sous l'effet de la crise économique, mais aussi de la mondialisation, de l'accélération des mutations, de la précarisation des parcours individuels, les habitants des pays occidentaux (et pas seulement la France : le vote d'extrême-droite progresse partout) ont abandonné leurs idéaux d'universalité et de solidarité. Partout, l'espoir individuel et collectif est en berne et cette affaire-là durera aussi longtemps que la crise. Au moins.
En France, l'élection présidentielle de 2007, et le formidable espoir cristallisé autour de Nicolas Sarkozy, a été une sorte d'ultime bouée de sauvetage saisie par les Français comme un remède à la morosité et au désespoir.
Quatre ans et quelques crises plus tard -plutôt bien gérées, d'ailleurs-, notre Président connait un creux de popularité à la hauteur de l'espoir qu'il avait suscité. Ce creux ne présage pourtant en rien, j'en ai la conviction, des résultats de la future élection...
En tout cas, le moral collectif est au 36ème dessous et au fur et à mesure que le désespoir nous gagne, Marine Le Pen grimpe dans les sondages : classique et ce n'est pas fini.
Le moment me semble bien choisi pour dire ceci : je garde chevillée au corps une foi indestructible dans l'intelligence de l'électeur et j'ai la conviction qu'il faut nous garder de singer l'extrême-droite ou de reprendre à notre compte ses fausses solutions.
Avec force, avec conviction et avec espoir, je redis que la ligne prônée par le FN serait suicidaire. L'enfermement sur nos préoccupations individuelles ou nationales (qui signe notre actualité locale, nationale ou mondiale), l'ostracisme généralisé, le rejet de tout ce qui est différent de nous ou de nos habitudes ancestrales, ne sont que des illusions démagogiques sans issue. La députée UMP qui s'est laissée aller à souhaiter "renvoyer les bateaux d'où ils viennent" est un exemple de couardise, d'aveuglement et de bêtise. Hélas, d'autres suivront sur ce chemin : j'en fais le pari !
Ceci dit, le rejet de l'obscurantisme FN ne fait pas un programme et sans doute faut-il voir aussi, derrière la montée du FN, la lente désagrégation des projets des autres formations politiques, l'érosion du politique là où les électeurs l'attendent, au quotidien.
Cette question-là ne peut pas rester longtemps sans réponse. Et elle plaide, notamment, pour que la famille centriste à laquelle j'appartiens plus que jamais, ne reste pas sans voix dans les mois qui viennent : face à tous les faux-semblants, les prédicateurs de fin du monde, et les démagogues de tous poils, une voix forte doit se faire entendre pour plaider la construction commune d'un avenir ouvert, le renforcement de l'Union européenne, la remise en ordre de nos comptes publics, la ré-invention d'une laïcité qui soit de notre temps, et un plus juste compromis entre l'indispensable solidarité et la promotion des initiatives individuelles et collectives qui, seules, nous sauveront.
C'est dans cet élan collectif tourné vers l'avenir que nous trouverons nos solutions, pas dans le repli sur soi nostalgique généralisé. Dans les mois qui viennent où "ça va tanguer", il faudra savoir rappeler ce cap, quoi qu'il puisse en coûter sur le moment : la famille centriste doit être aux avants-postes de ce combat-là qui lui ressemble et qui fonde son existence-même.