Agen, coeur battant : (re)parlons méthode
Le 18 octobre dernier, en adoptant son plan "Agen, coeur battant" en faveur d'un centre-ville rénové et tourné vers l'avenir, la majorité municipale s'était engagée à réaliser une évaluation transparente et contradictoire de ce plan et de procéder, au printemps, aux modifications qui s'avèreraient nécessaires.
Depuis cette date, nous n'avons cessé de tenir cet engagement, convaincus qu'il nous fallait faire preuve à la fois de détermination et de courage, d'ambition pour le coeur de ville, mais aussi de capacité d'écoute et de réactivité.
Détermination pour laisser "le temps au temps", c'est-à-dire aux nouvelles habitudes de se prendre et dépasser les réactions immédiates qui accompagnent toujours des changements.
Ambition pour enrayer le cercle vicieux de la perte d'attractivité du centre-ville.
Capacité d'écoute, pour entendre le témoignage de chacun, mesurer à la fois les progrès et les difficultés, construire des mesures de correction qui soient utiles et ne réduisent pas à néant les ambitions initiales.
Nous avions annoncé cette "ligne", cette méthode, dès le début et j'ai eu l'occasion, ici et ailleurs, de la rappeler à de nombreuses reprises. Mais j'ai bien senti, durant ces derniers mois, que beaucoup de mes interlocuteurs n'y croyaient pas, nous accusant pêle-mêle d'être soit entêtés, soit vélléitaires.
A quelques jours du Conseil municipal qui fera ce travail d'évaluation et de modification, je souhaite revenir ici sur cette "méthode" municipale et sur ses vertus.
Ce temps d'adaptation, depuis le 18 octobre, a eu son effet et en 6 mois, bien des choses, déjà, ont changé :
Le Boul' piéton : c'est, forcément, la mesure la plus emblématique du plan ACB, à la fois la plus audacieuse, la plus redoutée par certains et la plus attendue par la majorité des habitants de l'agglo. Au moment où va s'achèver la tranche sud des travaux, chacun peut déjà mesurer la profonde transformation que ces travaux vont engendrer.
Avec mes collègues Laurence Maïoroff et André Gounou, avec l'Union des commerçants, avec les riverains et les différents usagers de cette future zone piétonne, nous travaillons depuis quelques semaines, à la demande de Jean Dionis, à définir les futures règles de vie de cette zone : les esprits, déjà, sont dans l'après-travaux.
Les navettes : lancées dans un climat d'incrédulité rigolarde voire exaspérée, ces navettes ont trouvé aujourd'hui leur premier public. Qu'il s'agisse des navettes "P+R", qui relient les parkings gratuits de périphérie au centre, ou de la navette "Coeur d'Agen", ces navettes constituent un élément clé qui, je l'ai déjà dit ici, est sans doute un des seuls outils alternatifs durables à la voiture.
Les modifications qui vont intervenir dans le plan de circulation, et notamment la suppression des sites propres Boulevard Carnot, ne nous font pas oublier cette vérité d'évidence : nous devrons poursuivre notre action ambitieuse dans ce domaine, y compris sous la forme de priorités données aux carrefours, etc... Cette affaire-là prendra du temps, nous le savons bien, mais la direction à prendre est connue de tous, et ces derniers mois ont contribué à faire évoluer les esprits.
Le changement de sens de la rue des Cornières : au début de notre réflexion municipale, je n'étais pas emballé par cette inversion de sens dont l'intérêt ne m'est apparu qu'au cours de l'été dernier, au fil des réunions. Depuis le 29 novembre, l'ensemble ainsi constitué par le sens unique de Jasmin aux Laitiers, la voie "bus-vélos" en site propre, tout cela crée une très belle entrée de ville qui a tout de suite trouvé ses adeptes, qui en apprécient le cadre, plus apaisé, plus attractif. Cette partie du Boulevard est devenu un atout pour notre coeur de ville et je parierais volontiers que dans les mois qui viennent, les Agenais feront de ce tronçon un modèle, à reproduire ailleurs.
Le Boulevard Carnot : de tous les aspects d'ACB, c'est celui qui s'est heurté aux plus grosses difficultés. Cela fait 130 ans que les Agenais ont pris l'habitude de traverser leur ville par son coeur. En supprimant le transit à la fois sur l'axe Ouest-Est (République) et sur l'axe Nord-Sud (Carnot), nous avons sans doute pêché par excès de volontarisme.
Encore faut-il rappeler que personne (ni élus, ni techniciens, ni commerçants, ni riverains), malgré les dizaines de rencontres, réunions de travail, discussions, n'avait mesuré les difficultés engendrées par cette partie du plan. Mais l'humilité impose de reconnaître la nécessité de modifier là nos projets quitte, un peu plus tard, à y revenir.
Au final, ce plan "Agen, coeur battant" montre la valeur de la méthode retenue. Beaucoup de réflexion et de concertation en amont, de la volonté politique au moment de la décision et dans sa mise en oeuvre, de la transparence dans l'évaluation et de l'humilité dans les corrections.
Dit autrement, nous affirmons le droit à l'expérimentation dans la gestion publique, pourvu qu'elle soit pensée, partagée et transparente.
A dire le vrai, cette affaire-là me rappelle un autre grand chantier municipal, celui du schéma directeur des écoles : là aussi, nous avons beaucoup réfléchi, dialogué, débattu, amendé notre projet initial et nous le mettons en oeuvre.
Autre expérimentation : les conseils de quartiers. Là encore, rien n'était gagné d'avance et le principe de réalité aurait pu nous amener à revoir notre copie. Mais 2 ans après, ces conseils de quartier sont devenus une référence dans le monde des collectivités locales. Là aussi, il fallait oser l'expérience.
Je crois beaucoup à cette méthode d'exprimentation. Encore faut-il y mettre les qualités humaines qui vont avec :
Du courage, mais aussi de la sagesse.
Des convictions, mais aussi de l'humilité.
De l'audace, mais aussi de l'écoute.
De la volonté, mais aussi de la patience.
Chacun le comprend : ces dosages sont subtils, et donc perfectibles, instables, fragiles. Il se trouvera sans doute des habitants pour nous reprocher, à tort d'ailleurs, d'avoir abandonné nos ambitions : la synthèse est un art compliqué et le consensus, une chimère.
Mais dans cette affaire, Jean Dionis et l'équipe municipale ont fait preuve, une fois de plus, des qualités sans lesquelles le gouvernement d'une ville, aujourd'hui, ne peut réformer.
C'est la marque des équipes qui vont loin et qui font avancer leur territoire.
Et celà mérite d'être souligné.