Chiche !

Publié le par Bernard LUSSET

Il ne fait décidemment pas bon parler de l'indemnité des élus ! A peine le dernier conseil municipal passé, au cours duquel cette question a été évoquée, le Petit Bleu publiait le courrier d'un lecteur -anonyme-  de Foulayronnes qui me prenait au mot (lire ce courrier de lecteur). J'aurais aimé lui répondre personnellement mais je ne suis pas parvenu à ce jour à obtenir ses coordonnées.  A défaut donc, je publie sur ce blog la réponse que j'aurais aimé lui adresser personnellement...

 

 

Madame ou Monsieur,


J’ai lu votre interpellation publiée dans le courrier des lecteuranonyme2.jpgs du Petit Bleu et je me permets de vous y apporter une réponse dans ce blog.

 

J'aurais préféré vous adresser personnellement ce courrier et donner à la suite de notre échange un tour moins public. Mais, manifestement, vous souhaitez protéger votre anonymat. Voilà, entre nous, une première différence : un élu, ça s'expose...

 

Quoi qu'il en soit, comme vous n'avez pas hésité à m'interpeller publiquement et à m'appeler "à la décence", voilà ma réponse qui vous parviendra peut-être...


D’abord deux remarques préalables.

 

1. Relisez bien l’article où mes propos ont été évoqués : comme à chaque fois que je parle de l’exercice de mon mandat d’élu, je commence toujours par dire que ne sont élus que ceux qui l’ont bien voulu : on n'a jamais forcé un élu à l'être... C'est pourquoi jamais je ne me suis plaint de rien : j’ai accepté d’être candidat, j’ai accepté les responsabilités qui m’ont été confiées. Et il se trouve que, par mon parcours antérieur, je savais que je m’exposais, entre autres choses, à des témoignages comme le vôtre. Donc, contrairement à ce que vous prétendez, je ne me plains de rien.

 
2. Contrairement aussi à ce que vous laissez entendre, je ne m’imagine pas davantage être indispensable ! D’autres avant moi ont exercé cette responsabilité et d’autres, après moi, le feront. J’essaie simplement, le temps où cette mission m’est confiée, de m’en acquitter du mieux possible. Ca s’appelle la vie démocratique.


Alors, de grâce, évitez-moi ces deux mauvais et injustes procès que je ne mérite pas.


Ensuite, je souhaite rectifier les inexactitudes que votre emportement démagogique contre les élus vous fait dire :

 

Avantages divers

  • Ma voiture ? Mais c’est la mienne, pardi ! Je l’ai achetée, j'en paie l'essence, l’assurance, les frais divers comme tout le monde: que croyez-vous ? Je n’ai jamais demandé un centime de défraiement considérant, justement, que mon indemnité est faite pour ça.
  • Mon téléphone ? Mêmes remarques : c’est le mien, je l’ai acheté, j’en paie l’abonnement. Ca vous étonne ?
  • « Etc… » dites-vous ensuite  : de quoi parlez-vous ? Des frais de restaurant ? C’est moi qui paie mes repas, y compris quand j’invite pour la Mairie. Vous voyez autre chose encore que je n’aurais pas imaginé ? Quelque sombre avantage que je chercherais à dissimuler ?
  • « Argent de poche » dites-vous ? Vous êtes décidemment bien mal informé(e) et votre volonté d’être désagréable avec les élus vous fait dire bien des sottises… 

Un professionnel de la politique ?


Vous dites dans votre courrier une chose et son contraire : d’une part, vous me reprochez d’avoir un métier à côté de mon mandat d'élu et, de l’autre, vous affirmez que l’engagement dans la vie publique ne devrait pas être une profession : il faut mettre un peu d’ordre dans vos déclarations…


La réalité, Madame ou Monsieur, est plus simple que ça : j’ai un métier, en effet, et j’ai fait le choix, en 2008, d’être candidat puis 1er adjoint au maire d’Agen. Cet engagement me mobilise une trentaine d’heures par semaine, en moyenne. Une part importante de ce temps est prise sur le temps familial, amical et personnel. Mais elle est aussi prise sur mon temps de travail. Tout naturellement, cette situation n'est pas sans conséquence sur ma rémunération. Je perçois donc sans honte l'indemnité légale que me verse la mairie le temps du mandat.


Tout à votre emportement contre les élus, vous passez à côté d'une question essentielle : comment s'engager dans la vie publique quand on n'est ni riche, ni retraité, ni fonctionnaire ? Dit autrement, comment faire de la politique le temps d'un mandat et prévoir, à la fin de ce mandat, le retour à la vie civile quand on n'est dans aucune de ces trois situations, ce qui est mon cas ? Ca, c'est une vraie question qui, faute de trouver réponse, voit les responsabilités électives essentiellement occupées par des gens qui soit bénéficient d'un retour à l'emploi garanti au terme de leur mandat, soit sont en fin de parcours professionnel.

 

Mais évidemment, évoquer la réalité des conditions d'exercice du mandat et du retour à l’emploi pour les élus en fin de mandat, ça, personne n’en parle et vous pas plus qu'un autre : c’est tellement plus facile de briller au café du commerce sur les élus qui « se gobergent », qui s’en mettent plein les poches, qui ne pensent qu’à eux. Succès garanti, pas vrai ? Demandez-vous plutôt pourquoi il y a si peu d'hommes et de femmes actifs, salariés de petites entreprises, commerçants, indépendants ou professions libérales qui s'engagent en politique...

 

Chiche !


Oui, comme je l’ai dit dans le journal, je vous le redis aujourd’hui : chiche ! Je vous engage, puisque vous avez la langue si bien pendue et l’offuscation si facile, à faire comme tous les autres élus :

  • présentez-vous à une élection,
  • faites campagne,
  • soyez élu(e),
  • faites votre boulot d’élu honnêtement,
  • ayez quelques satisfactions de voir certaines de vos idées reprises,
  • faites-vous engueuler quand quelque chose ne va pas, même quand vous n’y êtes pour rien,
  • découvrez un matin votre nom associé à un « appel à la décence » lancé dans le journal par un citoyen anonyme au plus fort de son courage…

Faites ça, Madame ou Monsieur.

 

Et quand vous aurez fait tout ça, renoncez à votre indemnité ou faites-en don intégralement à des œuvres : si je suis encore de ce monde, je vous promets un salut public de ma part.


Vous êtes bénévole dans une association ? Si vous faites ça, comme je l’ai fait et le referai sans doute au terme de mon mandat, alors ça veut dire que vous croyez qu’il est utile de mobiliser de son temps, de son énergie et de son argent au service d’une cause, au service des autres. Je pense la même chose et je le fais. Pourquoi êtes-vous aussi vindicatif(ve) à l’égard de ceux de vos concitoyens qui s’engagent dans la vie publique ? Percevoir une indemnité pendant un mandat rendrait cette mission indigne à vos yeux ? Curieux raisonnement...


Je n’ai pas l’espoir de vous convaincre : les élus sont « tous pourris », n’est-ce pas ? C’est tellement rassurant…

 

Continuez comme ça et, vous verrez : vous finirez par décourager les mieux intentionnés.

Publié dans on en parle à Agen

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