Hollande - Ayrault : combien de temps ?
Combien de temps tout cela peut-il durer ? Je me pose insensiblement cette question devant le visage surprenant qu'offre la majorité depuis l'élection de François Hollande. Certes, je ne suis pas suspect de complaisance à l'égard du nouveau Président de la République, mais j'avais en tête qu'étant légitimement élu pour 5 ans, Président de la République et majorité parlementaire étaient partis pour un quinquennat. Je me prends à en douter.
Pourquoi ?
Un problème de costume
Je n'évoque pas ici les problèmes de tailleur que, manifestement, le Président de la République rencontre pourtant l'éloignant de la réputation française d'élégance... Non, quand je parle de costume, je pense à la "présidentialité" de François Hollande.
Il a voulu faire "normal" et il fait ordinaire.
Il voulait être économe des deniers publics et il fait cheap.
Il voulait être ouvert au dialogue et il fait indécis.
Il voulait être l'anti-Sarkozy et... il nous fait regretter l'ancien Président (ce qui n'était pourtant pas gagné...!)
Oui, François Hollande a, clairement, un problème de costume présidentiel et il n'est pas sûr que les talents de tous les spécialistes de communication qui se penchent sur lui suffisent à rompre ce sentiment croissant chez les Français. Cinq mois après son élection, il serait temps qu'il prenne la mesure de sa fonction : nous en sommes loin et les Français commencent à le dire avec une certaine exaspération teintée d'inquiétude.
Un premier Ministre qui ne l'aide pas
Jean-Marc Ayrault est sans doute un honnête homme et, si ça se trouve, un bon Maire de Nantes. Mais comme chef de gouvernement et chef de la majorité, c'est sûr, lui non plus ne fait pas la maille. Il règne dans son gouvernement un bazar indescriptible où les Ministres n'hésitent plus -c'est un signe- à braver les interdits pour y aller de leur commentaire sur l'actualité ou suggérer des inflexions politiques au gouvernement contre l'avis même du premier Ministre et du Président : adoption par les couples homosexuels, libéralisation du cannabis, intégration des oeuvres d'art dans l'ISF, objectif de réduction à 3% du déficit, application d'une redevance audiovisuelle dans les résidences secondaires, taxation des plus-values sur les cessions d'entreprise, etc... Y-a-t-il là-dedans quelqu'un qui dirige ? On se met à en douter sérieusement.
On a beaucoup glosé sur le premier Ministre "collaborateur" dans le couple Sarkozy-Fillon. Comment qualifier ce couple exécutif Hollande-Ayrault où l'impréparation le dispute à l'incohérence ?
Une espérance insatisfaite
Vous connaissez quelqu'un qui revendique aujourd'hui encore son vote en faveur de F. Hollande (hormis les militants PS eux-mêmes ?). Ca ne court pas les rues et j'en vois quelques-uns qui commencent à regretter leur abstention au second tour de la présidentielle ou des législatives du printemps... L'insatisfaction face aux promesses non tenues, en revanche, croît de manière spectaculaire. Il est vrai que Hollande n'a pas été avare de promesses en tous genres et que les Français ont été d'une grande légèreté dans leur art de tout gober. Mais quand même...
Fiscalement, (quoi qu'en dise le Maire de Villeneuve, avec une force de conviction qui suit la courbe des sondages), tout le monde a compris que les "classes moyennes" vont en prendre plein la figure. Et encore faut-il bien comprendre de qui on parle : font partie des classes moyennes tous les couples qui travaillent et, a fortiori, tous les cadres, commerçants, artisans, professions libérales, quel que soit leur niveau de rémunération. Ce n'est pas exactement ce qui avait été annoncé dans le discours contre les "riches" : ceux-là continueront, comme toujours de s'en sortir et ils ne manquent d'ailleurs pas d'affinités avec nos nouveaux dirigeants pour se faire entendre...
Les collectivités locales, majoritairement dirigées par des équipes socialistes, n'avaient pas de mots assez durs jusqu'en mai pour décrire les mauvaises conditions qui leur étaient faites par l'Etat. Rien n'a changé depuis, au contraire... mais elles ne disent plus rien ! Jusqu'à quand ?
L'activité économique est au plus bas. Non seulement, le gouvernement s'apprête à nous faire absorber une purge de taxes et impôts divers qui vont faire plonger la consommation et les investissements et fuir les plus entreprenants des Français mais, en plus, tout ça est fait en pure perte puisque l'Etat ne saisit pas l'occasion de préparer le rebond en réduisant ses dépenses de structure et en allégeant le coût du travail. Du sang, des larmes et de la récession... pour rien.
Le dialogue social, tant prôné aux temps de la campagne, est en panne. Les organisations syndicales ne cachent plus leur insatisfaction ni leur incrédulité sur la méthode choisie. Quant au patronat, il hausse le ton avec d'autant plus de force que sa base, elle aussi, commence à en avoir raz-le-bol à la fois de contribuer aux ressources d'un Etat impécunieux mais, de surcroît, d'être en permanence désigné comme le fauteur de troubles. Même le Ministre du "Redressement productif", qui faisait sourire au début, lasse ses interlocuteurs avec ses déclarations à l'emporte-pièce et ses incapacités successives.
La relance européenne, que François Hollande se faisait fort de renégocier, est tombée à l'eau : la voix de la France est devenue, en quelques mois, inaudible à force d'être confuse, alors même que c'est là que se joue l'essentiel. Sans parler des postures présidentielles en Afrique, à New-York ou ailleurs où les discours sonnent creux et font sourire (cf le dernier séjour africain de FH)
Des parlementaires bien discrets
Et ils sont où nos parlementaires socialistes lot-et-garonnais ? On les entend encore dire, dans de rares interviews, tout le mal qu'ils pensent de Sarkozy et de ceux qui l'ont soutenu. Mais ça commence à sentir le réchauffé, cinq mois après l'alternance. L'arrogance et l'intolérance, si elles les caractérisent, ne fondent pas une politique...
Que font-ils ? Que pensent-ils ? Travaillent-ils ? Et à quoi ? Quels dossiers portent-ils ? Le moins qu'on puisse en dire, c'est que leur soutien au gouvernement est discret, au fur et à mesure où l'insatisfaction gagne le pays et leur propre département.
Cinq ans ? C'est le terme constitutionnellement fixé pour ce Président. Mais aujourd'hui, j'ai un peu de mal à imaginer que tout ça puisse durer aussi longtemps...
Faut-il d'ailleurs le souhaiter pour le pays ?