De l'énergie en politique : l'Agglo d'Agen

Publié le par Bernard LUSSET

Le nouveau Conseil communautaire de l'Agglo d'Agen à 29 communes s'installe ce jeudi. Je voudrais formuler ici quelques remarques qui me viennent au sujet de ce véritable évènement :

 

Trop vite ? Trop fort ?

 

Vous avez sûrement déjà entendu ce reproche, peut-être même l'avez-vous déjà formulé vous-même : Jean Dionis irait "trop vite, trop fort". Trop vite vraiment ? Alors que les citoyens s'insurgent de voir les politiques trop peu efficaces, trop lents à la détente, trop timorés dans leurs choix, il serait quand même paradoxal et, pour tout dire profondément injuste, d'instruire ce procès-là d'un élu qui, au contraire, se donne les moyens d'atteindre les résultats qu'il avait annoncés.

ch delta jds

 

Je peux témoigner que sans cette volonté d'aller "vite", l'unité agenaise saluée jeudi ne se serait pas faite toute seule ! Entre les conseils de "prudence" des uns, les appels à la "réflexion" des autres, les critiques d'autres encore accusant J. Dionis de "brader" les intérêts d'Agen, il s'est trouvé beaucoup de beaux esprits pour dire : "moins vite", "plus tard", "après", "une autre fois"... C'est sûr que si le Président de l'Agglo avait écouté tous ces conseils, il ne se serait rien passé et c'eût été bien dommage pour nous tous ! 

 

C'est pourquoi j'aimerais profiter de cette étape intercommunale importante pour tordre le cou aux idées toutes faites : l'action publique nécessite beaucoup d'énergie, beaucoup d'ambition, beaucoup de volonté. Oui, il faut vouloir aller "vite" pour que les choses évoluent un peu. L'action menée par Jean Dionis, à la tête de l'agglo comme de la Ville, en est une illustration flagrante.

 

Ce faisant, là comme ailleurs, JDS nous bouscule-t-il tous un peu ? Oui ! Prend-il, du coup, des risques électoraux ? Assurément : la "vague rose" de 2012 explique en partie le résultat des dernières législatives ; mais il y a eu, aussi, des ressentiments locaux qui se sont exprimés, chacun le sait bien, à commencer par Jean Dionis lui-même.

 

Mais au bout du compte, nos votes de protestation, nos votes blancs, nuls ou nos abstentions au premier comme au second tour des législatives, bref, notre manifestation de mauvaise humeur, à quoi tout cela a-t-il abouti ? A l'élection de Mme Lousteau comme député ! Sommes-nous vraiment gagnants avec un député socialiste de plus...? Sommes-nous heureux d'avoir voulu sanctionner un élu soupçonné d'aller "trop vite" alors qu'en réalité, il ne fait que mettre en oeuvre les engagements pris ? Tout ça n'est pas très sérieux...

 

Un dernier mot encore sur ce pseudo-sujet de "Dionis, trop vite, trop fort" : à la seule exception de Pont du Casse qui n'a pas eu le choix, les 28 autres communes qui ont fondé l'Agglo d'Agen l'ont choisi librement et à une écrasante majorité. Que je sache, aucun des Maires n'aurait accepté d'engager durablement sa commune dans une aventure qui aurait été prématurée, mal préparée, bâclée ou inutile : ils ont, en réalité, été séduits par le projet, la méthode et le calendrier.

 

Peut-être est-il temps d'en donner acte à J. Dionis et de reconnaître que son énergie communicative a été essentielle.

 

Agglo à 29 : qui est gagnant ?

 

Tout le monde. Absolument tout le monde. 

 

> Les 29 communes membres

 

De Marmont Pachas à Agen, de la plus petite à la plus grande commune, de la plus rurale à la plus urbaine, toutes les communes membres gagnent dans ce rassemblement des forces : elles y gagnent d'abord par la mise en commun de compétences qu'elles exerçaient soit isolément, soit au sein de communautés plus petites. Personne ne peut contester qu'en matière d'éclairage public, d'assainissement, de transports urbains, d'urbanisme etc... on est plus forts ensemble. Dit autrement, cela revient à dire que, très vite, nous pourrons faire mieux avec le même budget ou rendre le même service pour moins cher. Au moment où le discours ambiant cherche à pointer la prodigalité des élus locaux, il faut être honnête : ce groupement est source d'économies futures dans une époque où on les traque avidemment.

 

> Les habitants de l'Agglo

 

Qui, en-dehors de l'Agglo, aurait eu les moyens de financer la rocade Beauregard-113 ?

Qui, sinon l'Agglo, peut aider le financement des projets structurants des communes et donc, le service rendu à leurs habitants ?

Des bus qui desservent l'Agropôle, mettant ainsi fin à 30 ans d'absurdité administrative, ce n'est pas utile aux habitants de l'Agglo ?

agglo-agen.jpgAu moment où le chômage explose, qui peut contester l'importance pour nos emplois locaux de la création d'un second échangeur autoroutier ou des 40 ou 50 premiers hectares de zone économique à Ste Colombe ?

Mettre en commun nos règles d'urbanisme avec tout ce qui va avec : nos transports publics, nos parkings, nos zones d'activité, nos zones d'habitat, nos espaces naturels, etc... Pas essentiel pour les habitants de faire ça à 29 ?

 

On pourrait égrener les catégories d'habitants qui vont se retrouver gagnants, des plus jeunes aux plus âgés, des actifs aux retraités, des amateurs de sport aux amateurs de culture, des chefs d'entreprises aux salariés : par quelque bout que vous la preniez, cette nouvelle Agglo à 29 est une bonne nouvelle.

 

L'Agglo à 29 : aucun inconvénient ?

 

Les lecteurs de ce blog le savent : je m'efforce de me tenir ici à bonne distance de toute langue de bois. Cette nouvelle agglo à 29 a-t-elle des inconvénients, à côté de ses indéniables avantages ? Bien sûr ! Et on peut les lister ici :

 

> "dépossession" des communes ?

 

Il faudrait plutôt appeler ça "transfert de compétence" mais il faut aussitôt ajouter -et je le fais comme élu municipal- que les moyens d'action de nos communes, Agen compris, se réduisent comme peau de chagrin. Ne nous leurrons pas : entre les normes qui frappent les collectivités (comme les entreprises) la raréfaction de l'argent public, les exigences croissantes des populations, les communes et leurs maires sont, déjà, dépossédés de bien de leurs prérogatives.

 

Est-ce pour autant la fin de l'identité communale que pronostiquent quelques Cassandre ? Mais non ! Regardez ce que nous avons fait à Agen : il nous a semblé indispensable -et l'expérience nous conforte dans cette idée- de créer un échelon de proximité supplémentaire avec les conseils de quartier. Alors, avant que la commune disparaisse... Et puis, faut-il rappeler que les élus communautaires sont, avant tout, des élus municipaux : aucun parmi nous n'est prêt à des abandons de cette sorte.

 

> un échelon administratif de plus ?

 

Ca, c'est une critique juste. On pourra objecter que cet échelon a été créé par la Loi et que nous ne faisons que la mettre en oeuvre. On pourrait aussi dire, ce qu'on ne fait jamais, que ces intercommunalités qui émergent font disparaître quantité de syndicats intercommunaux devenus obsolètes.

 

Mais, surtout, la vraie réponse à cette critique, c'était le projet de fusion départements/régions que la nouvelle majorité présidentielle s'est empressée de défaire dès son arrivée : je parierais volontiers que, bientôt et sous des formes sans doutes légèrement remaniées, cette même majorité y reviendra. Si elle le fait, je la soutiendrai : le Département, en tant que tel, a largement vécu.

 

> éloignement des habitants ?

 

Là encore, pas de faux-semblants : oui, il y a un risque réel de reconstituer, à l'échelon de la Communauté, des "petites DDE", c'est-à-dire des services plus éloignés de la population que ne l'étaient ceux des Mairies. Mais ce risque est tellement perçu que l'Agglo d'Agen a pris quelques précautions : maintien de la délivrance des permis de construire par les Maires, création d'unité territoriales pour certains services de voiries, etc... Bref, face à ce risque, l'Agglo s'est donnée les moyens de garder la force d'un service de proximité. Et les élus municipaux y veilleront.

 

Seulement l'affaire d'un homme ?

 

Bien sûr que cette construction de l'Agglo à 29 est une affaire collective. Tellement collective d'ailleurs qu'entrer dans le détail me ferait courir le risque d'oublier quelques participations déterminantes. Pourtant, au milieu de toutes celles-là, je veux saluer l'action des administrations communales et communautaires, sous la conduite de Denis Solivérès, le directeur général de l'Agglo : vous n'imaginez pas à quel point les questions techniques à régler ont été innombrables et les angoisses existentielles, chez les fonctionnaires comme chez les élus. Pourtant, ces administratifs, cadres et salariés, se sont mobilisés comme jamais pour rendre cette unification possible. C'est donc, d'abord, à eux que je pense dans cette belle étape.

 

Mais parce que le rôle des politiques est d'initier les impulsions et de les assumer, je voudrais saluer aussi deux personnalités de l'Agglo nouvelle qui ont joué un rôle particulier aux cotés de Jean Dionis :

 

> Henri Tandonnet tandonnet

 

Président de la Communauté de Laplume et désormais Sénateur, Henri Tandonnet a été le co-fondateur de cette Agglo d'Agen. Il a su prendre des risques, convaincre ses troupes, défendre les intérêts de ses mandants avec un courage rare. Certes, Jean Dionis et lui sont amis depuis longtemps, mais on sait ce qu'il advient des amitiés en politique : elles ne prémunissent d'aucun coup de Trafalgar...

 

Ces deux-là ont eu l'intelligence de mettre leur amitié au service du projet : pendant toute cette phase de construction, leur amitié leur a permis des discussions plus franches, plus directes, sans circonvolutions inutiles. De la qualité de leurs débats a, pour une bonne part, dépendu le succès de l'opération et son calendrier. A ce titre, Henri Tandonnet qui s'est forgé une solide et justifiée réputation d'élu de terrain, peut légitimement revendiquer sa part dans cette nouvelle Agglo.

 

> Annie Galan

 

Les Agenais connaissent peu Madame le Maire de Sauvagnas ; elle est pourtant celle qui su résister aux sirènes du Grand Villeneuvois et embarquer, avec intelligence et courage, sa commune vers sa destinée agenaise. Ce n'était pas simple. annie-galan.jpg

 

Mais Annie Galan a fait plus : elle a été une sorte de "Ministre des petites communes rurales" au sein de l'Agglo. Forte de son propre parcours et de ses propres choix, elle a patiemment dégonflé les inquiétudes au sujet des "gros qui mangent les petits" et éclairé les choix de ses collègues maires ruraux au moment de s'engager dans la grande Agglo.

 

Ce rôle discret a été essentiel non seulement dans la réussite du projet commun, mais aussi dans le détricotage de toutes les couillonnades qui ont été racontées aux élus ruraux par tous ceux qui ne voulaient pas voir naître cette Agglo à 29 : certains sincèrement inquiets ou interrogatifs et d'autres simplement mûs par des arrières-pensées partisanes ou électoralistes.

 

Pas la fin de l'histoire

 

Le dernier mot de cette trop longue chronique sera pour dire ceci : l'Agglo à 29, telle qu'elle s'installe, ce n'est pas la fin d'une histoire : c'est le début d'une autre, passionnante. Est-ce que j'évoque ici une nouvelle extension du territoire ? A la seule exception de Castelculier (et St Pierre de Clairac) dont il serait scandaleux qu'elles ne nous rejoignent pas, l'Agglo a désormais atteint sa taille de croisière : pas de nouvelle extension en vue, donc. Et bonne chance à ceux qui auront préféré suivre un autre chemin que celui de l'unité agenaise.

 

En revanche, de nouvelles compétences, dans l'avenir, seront sans doute transférées à l'Agglo, et je le souhaite : à chaque fois qu'ensemble, nous pourrons produire un meilleur service au même coût, ou un service équivalent à moindre coût, il faudra "y aller" !

 

Le reste de l'histoire appartient au législateur qui donnera dans l'avenir, je l'espère, une légitimité démocratique plus grande aux Agglos. Demain, les électeurs voteront pour des conseillers communautaires clairement identifiés et qui dépendront de moins en moins des conseils municipaux.

 

Et c'est très bien ainsi.

 

 

 

Publié dans on en parle à Agen

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