En attendant... le Président de l'UMP
Je n'ai jamais cru à la large victoire de François Fillon à la tête de l'UMP que pronostiquaient les sondages qui se sont, une fois de plus, trop avancés. Mais en écrivant ici il y a un mois pourquoi je pensais probable la victoire de Jean-François Copé (relire ma chronique), je n'imaginais pas que cette élection donnerait lieu au happening de ces dimanche soir et lundi. Le spectacle des candidats et leurs équipes s'écharpant ne témoigne-t-il, finalement, que de l'exaspération de fin de campagne ? Pas si sûr.
La démocratie interne réclame des procédures
On le sent bien : les deux candidats se sont tellement méfiés l'un de l'autre dans la préparation de ce scrutin que, manifestement, les modalités pratiques du vote ont été sous-estimées. En pensant à l'organisation des scrutins nationaux dans une mairie, j'imagine volontiers les difficultés d'un triple vote des militants dans des bureaux qui, pour certains, comptaient plusieurs milliers d'inscrits, le tout avec une participation plus forte qu'on ne l'imaginait.
Tous les partis doivent en prendre de la graine : la démocratie interne, l'expression des militants, réclament des procédures et des modalités aussi rigoureuses que celles prévues par le Code électoral pour les scrutins ordinaires. Sans cette extrême rigueur d'organisation, les initiateurs de ces consultations prennent un grand risque : souvenons-nous, par exemple, du vote des militants PS et des difficultés à départager Martine Aubry et Ségolène Royal...
Le "parti unique" est-il mort ?
L'ambition des initiateurs de l'UMP était en 2002 de constituer un grand parti "unique" rassemblant la droite et le centre. L'UMP a su, sous l'impulsion notamment d'Alain Juppé puis de Nicolas Sarkozy, créer un mouvement fort qui a dominé la vie politique à droite, même si nombre de centristes, dont je fais partie, n'ont pas voulu rejoindre ce mouvement et forment désormais l'UDI.
Ce qui frappe, c'est que dès lors que la question du "chef" est redevenue ouverte à l'UMP, le mythe du parti unique a pris du plomb dans l'aile et les clivages anciens sont réapparus : la campagne Copé-Fillon et la faible marge avec laquelle le nouveau président va être élu en sont une parfaite illustration.
Or, faute de chef incontesté, on voit mal comment le parti dominant à droite pourrait préserver durablement son unité : les lignes forces qui ont été mises en évidence pendant cette campagne ne sont pas près de disparaître, malgré les appels à l'unité lancés, par exemple, par Alain Juppé sur son blog (voir l'appel intitulé "STOP !").
Alternance ?
Dans ces conditions, à 18 mois des municipales, l'opposition nationale se trouve dans une fragilité qui va, je l'espère, tempérer tous les enthousiasmes et toutes les certitudes affichés face à ce rendez-vous que certains voient gagné d'avance, par défaut, sur les ruines d'un PS en proie à mille difficultés.
Une nouvelle fois, quitte à jouer les Cassandre, je redis ici combien je redoute que le désappointement des Français à l'égard des socialistes ne profite pas mécaniquement à l'opposition, surtout si celle-ci affiche une incapacité à se rassembler face aux enjeux. Seule l'exaspération des citoyens peut sortir grandie de pareil spectacle.
Or, il n'y a pas d'alternance possible, pas de reconquête électorale imaginable, pas de rebond citoyen pour nos idées sans que les partis d'opposition témoignent de leur capacité à unir leurs forces. Et dans cette union, l'UMP est, évidemment, un acteur majeur de la reconquête : c'est un centriste de l'UDI qui le dit !
Sortir... par le bas
Une fois le verdict tombé à l'UMP, et quel que soit le Président ainsi désigné, chacun voit bien que les problèmes internes à l'UMP ne seront pas réglés pour autant. C'est pourquoi il est essentiel à mes yeux que, sur le terrain, les militants prennent en mains leur propre destin, tant le bal des ego à Paris risque de durer chez des gens qui, en réalité, ne cessent de regarder vers les prochaines présidentielles.
C'est sur le terrain, là où les clivages sont moins forts, là où les querelles d'écuries sont moins exacerbées, que nous pouvons -que nous devons- créer les conditions d'une alternance à laquelle, j'en ai la conviction, une majorité de nos compatriotes aspireront en 2014. L'hyper-concentration de tous les pouvoirs entre les mains du PS n'a pas disparue avec le happening de l'UMP : plus que jamais, le pays a besoin de ce rassemblement, même si le spectacle donné ces dernières heures par la droite le rend moins immédiatement crédible.
Au passage, je n'exclue pas qu'émerge là une occasion, pour les centristes de l'UDI, de faire entendre une musique différente...