La Grêce, l'Europe, la crise... et la France
En matière de finances, les marchés se trompent toujours, volant au devant des victoires annoncées ou précipitant les échecs amorcés : c'est se souvenant de cette constante qu'il faut apprécier le regain soudain des places financières lundi et aujourd'hui, après l'annonce du plan européen anti-crise. Nous verrons ce qu'il en advient dans la durée.
Et pourtant, malgré cet appel à la prudence sur l'avenir immédiat de la zone Euro, ce qui s'est passé ce week-end est un formidable évènement qui réjouit l'européen indécrottable que je suis.
Qu'on y regarde de plus près : entre
- une Grèce en banqueroute,
- une chancelière allemande affaiblie à la veille d'une élection locale qui lui coutera finalement sa majorité au Bundesrat,
- une Espagne et une Italie contraintes à la discrétion, de peur que les sun lights de l'actualité ne les désignent comme les prochaines victimes de la crise,
- une Angleterre à la recherche d'une improbable nouvelle coalition
il aura fallu la France et son Président (qu'on disait affaibli par les régionales d'il y a deux mois) pour faire faire à l'Union européenne, en un week end, un pas de géant qu'elle avait été incapable d'imaginer depuis le traité de Maastricht...
Incroyable retournement de situation quand les plus grands zélateurs de l'Union finissaient par douter de l'avenir politique de notre continent.
Certes, nous ne sommes pas sortis de la crise, et les pouvoirs publics de la zone euro sont bien contraints désormais à mettre en oeuvre une purge de leurs comptes qui sera douloureuse, et sans doute longue.
Mais, pour la première fois depuis des années (des décennies ?) l'Europe politique s'est affirmée ce week-end, dans la construction d'un plan d'urgence qui n'est pas seulement un Nième fonds de garantie, mais bien l'émergence d'une gouvernance économique à l'échelle de la zone Euro, 1000 fois souhaitée, annoncée, mais jamais réalisée.
Robert Schuman, dont nous avons célébré dimanche le 60ème anniversaire du discours fondateur, disait, déjà, que l'Europe ne pouvait se construire qu'au travers des crises qu'elle traverse. Comment ne pas lire, à travers les évènements du week-end, le caractère encore une fois visionnaire de ce discours ?
L'avenir seul dira si l'expression de la volonté politique de l'Union aura permis d'enrayer l'engrenage dangereux qui précipitait la Grèce. Mais ces dernières heures montrent en tout cas que, face à la crise, le rassemblement et le volontarisme politique sont nos meilleurs atouts.
Souvenons-nous en.