Les voyages de l'amicale des Maires
Décidemment, ces élus ne pensent à rien, sauf à eux-mêmes...! Cette petite rengaine, complaisamment relayée et emplie de rancoeur et d'ignorance, a fait florès ces derniers jours, au sujet du dernier déplacement de l'Amicale des Maires 47 aux Etats-Unis.
Après avoir précisé que je n'en étais pas, je souhaite cependant livrer ici un témoignage et avouer... ma part de responsabilité dans cette affaire.
Ces déplacements des Maires ont en effet été initiés en 1990, sous la présidence du Dr Paul Chollet, alors Président de cette Amicale et dont j'étais le collaborateur. A ce titre, j'exerçais la responsabilité administrative de cette association qui restera d'ailleurs un de mes meilleurs souvenirs dans mon parcours professionnel.
A l'époque -nous sommes en 1989- je me souviens de la surprise qui avait été la nôtre en découvrant le petit "trésor de guerre" qu'avait amassé les années précédentes cette Amicale : si les cotisations, même modestes, tombaient chaque année avec régularité, il y avait peu d'activités, hors la sempiternelle assemblée générale départementale. Ce "trésor de guerre" nous parut superfétatoire et, pour tout dire, un peu indécent. Nous vint l'idée de suspendre un temps les appels de cotisations et de poursuivre le ronron habituel de nos AG. Nous vint aussi l'idée de faire de cette Amicale un outil utile aux élus dans l'exercice de leur mandat. Parmi les initiatives que nous prîmes alors, naquirent ces déplacements d'élus.
Tout a commencé par l'organisation du déplacement des Maires du 47 au Congrès national annuel de l'Association des Maires de France. La plupart des "petits" maires n'y avait jamais participé et bon nombre d'entre eux n'étaient même seulement jamais allés à Paris... Nous avons donc organisé le déplacement en train, réservé les hôtels, monté une visite du Sénat et de l'Assemblée nationale. L'initiative connut immédiatement un succès fou, notamment chez les élus ruraux qui, seuls, n'auraient jamais seulement imaginé un tel déplacement. L'initiative fut renouvelée dès l'année suivante, aux frais de l'Amicale.
Et puis, en 1992, il y eu l'Exposition universelle de Séville. Une Expo Universelle, c'est un moment extraordinaire où, comme dans une grande foire, chaque pays du monde vient vanter ses mérites, mettre en lumière ses talents, ses innovations. Comme ces Expos se déroulent dans le monde entier, rares sont ceux qui ont l'occasion de traverser la planète pour y assister. La proximité de l'Espagne, la facilité d'organisation de ce déplacement convainquirent alors le bureau de l'Amicale d'organiser, sur 2 jours si mes souvenirs sont exacts, ce déplacement en avion jusqu'à Séville.
A ce stade, je veux dire ici qu'après Paris et Séville, les Maires -y compris les plus réticents au départ, car il y en avait- ont pu mesurer à quel point ces déplacements servaient, au-delà de leur satisfaction propre, les intérêts de leur mandat :
- d'abord dans les contacts informels entre élus : les gens l'imaginent mal mais les maires, s'ils se voient souvent en réunion, n'ont jamais le temps d'échanger entre eux, pressés entre un agenda souvent compliqué et la difficulté des sujets de leurs réunions. Dans ces déplacements de l'amicale, "petits" et "grands" élus de Lot-et-Garonne se cotoient, échangent leurs expériences, se donnent des tuyaux, se parlent et surmontent des non-dits : on ne dira jamais assez à quel point ces déplacements sont fructueux pour l'administration de nos communes.
- autre intérêt de ces déplacements : ouvrir les yeux des élus sur les réalités du vaste monde, "lever la tête du guidon". J'ai vu, de mes yeux, ces élus découvrant à Séville, de pavillon en pavillon, telle innovation, tel projet, telle réalisation, venus des 4 coins du monde : ces déplacements les ont changés.
Durant le temps où le Dr Chollet présida cette Amicale, tous les deux ans, nous avons organisé pareils déplacements : Prague et Saint Pétersbourg, quelques années après la chute du mur de Berlin dans cette Europe dont nous ignorions tout, le sud marocain où le choc des cultures et nos visites de vergers d'orangers restent des souvenirs d'une rare intensité, la Vallée du Nil. A chaque fois, pas d'hôtels luxueux ni de séances de transats au bord des piscines mais des visites agricoles et industrielles, des rencontres avec nos représentants consulaires, des visites de lieux culturels, le tout à rythme très soutenu.
Je crois savoir que, durant la présidence d'Alain Veyret, ces déplacements se sont poursuivis dans le même esprit et c'est tout naturellement que, depuis 2008, il en est encore ainsi.
Je plaide pour l'utilité de ces déplacements des élus dans l'exercice de leur mandat : que font les grandes entreprises dans les séminaires qu'elles organisent pour leurs cadres, sinon les mettre ensemble et leur faire découvrir, en groupe, telle ou telle réalisation ? Elles ne le font pas pas générosité pure, mais parce qu'elles savent bien tout le bénéfice que l'entreprise retire de tels déplacements...!
La vérité m'oblige à dire qu'à cette époque -autres temps autres moeurs- la "pression citoyenne" (ou, pour dire plus exactement ce que je pense : l'orthodoxie faux-cul-iste) était moins forte : ces déplacements ont contribué à ramener notre "trésor de guerre" à de plus justes proportions, même si, dès le départ, les conjoints se sont acquittés de l'intégralité du coût de leur voyage.
C'est à partir de ce déplacement à Séville qu'est véritablement née l'idée d'organiser ces déplacements de l'Amicale des Maires. Et au fur et à mesure où ces voyages se sont pérennisés dans le temps, la part financière prise en charge pour les élus par l'Amicale s'est réduite. Pour le dernier voyage en date aux Etats-Unis, la contribution de l'Amicale au bénéfice des élus était d'ailleurs symbolique.
Faut-il aller jusqu'à la supprimer, pour clouer le bec aux jaloux ou aux suspicieux ? Je laisse le soin au bureau de l'Amicale de trancher cette question... Mais au moment où il est de si bon ton de gloser sur ces élus qui ne pensent qu'à eux, je me vois mal laisser le président de l'amicale des Maires -même s'il n'a besoin de personne pour se défendre !- subir seul, dans le silence un peu assourdissant de ses collègues, l'opprobre populaire sur une initiative dont il n'est, en réalité, que le continuateur au nom de tous... et dont j'ai été un des initiateurs dans une autre vie !