Mariage pour tous : oui mais...

Publié le par Bernard LUSSET

A défaut de mener une action efficace contre le chômage, le gouvernement va porter dès ce début 2013 une de ces réformes dites "sociétales" qui sont censées partager le monde entre les réformateurs, forcément progressistes, généreux et à gauche et les conservateurs, forcément ringards et à droite. Je veux parler du "mariage pour tous", même si la formule elle-même me semble décidemment bien mal choisie.

 

J'ai déjà dit dans ce blog que je n'étais pas opposé à l'extension aux couples homosexuels du mariage et du droit à l'adoption. Je ne participerai donc pas aux manifestations du 13 janvier contre ce projet, à la différence de bien de mes amis : on a le droit d'avoir ses moments de solitude...  J'aurais certes volontiers réservé le mot "mariage" aux couples hétérosexuels : ça aurait sans doute évité de cliver le pays ; mais j'ai aussi dit le peu d'importance que je porte au mot lui-même. Allons-y donc pour le mariage ! J'espère au moins que le gouvernement ne cèdera pas aux lobbies en faveur de la PMA : ça pourrait me donner envie de défiler en janvier...    

 

Ma position devant ce projet, favorable sans enthousiasme, ne m'interdit pas d'être lucide sur la méthode, bien maladroite, adoptée par le gouvernement dans cette affaire. Lisez plutôt (lire) le compte-rendu des auditions qui se sont déroulées à l'Assemblée juste avant Noël auprès de juristes qui ont exprimé leur soutien au projet : leur conclusion pourrait être "ni fait, ni à faire" ! Au centre des critiques, la suppression, même partielle, des notions de père et mère. On n'est quand même pas obligé, parce qu'on ouvre le mariage aux couples homosexuels, de supprimer la notion même de père et de mère !! Les juristes qui se sont exprimés, alors même qu'ils sont favorables au principe, dénoncent même les injustices faites, dans le texte gouvernemental... aux couples hétérosexuels, qu'il s'agisse de droit de la filiation, de PMA, d'adoption ! On croit rêver...

 

Si le gouvernement a l'intention de mener au bout sa réforme, il a intérêt à retravailler son texte dont tout le monde dénonce l'approximation. Sans quoi, s'il résiste aux manifs à venir, il n'est pas sûr qu'il résistera à la lecture que le Conseil Constitutionnel fera de telles âneries. On voit là la nature profonde de ce texte : il est d'inspiration sottement égalitariste. Et, comme on le sait, l'égalitarisme est un totalitarisme.

 mariage code civil

On pourra lire ici le texte précis de ce projet de loi et y constater que rien moins que 10 codes (!) sont ainsi modifiés (*), ainsi que les statuts des fonctions publiques d'Etat, Hospitalières et des collectivités locales, l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des enfants. Sont également réformés les statuts particuliers de la Polynésie française, de Wallis et Futuna ainsi que celui des Terres Australes et Antarctiques Françaises, où, comme chacun le sait, les couples homosexuels sont très nombreux à réclamer le droit au mariage...    

 

Entre les extrémistes de tous poils, pro et anti confondus, je m'efforce de faire preuve de modération (et c'est chaque jour plus difficile devant un texte aussi bâclé...). Je fais ainsi partie de ceux qui pensent que cette réforme répond à une évolution de notre société. Mais à condition que le droit des couples homosexuels ne s'épanouisse pas au détriment des couples formés d'un homme et d'une femme et qu'on en vienne pas à détricoter toute notre politique familiale.     

 

Il faudra donc regarder avec attention ce que vont faire nos parlementaires dans l'examen de ce texte à l'Assemblée et au Sénat. Le moins qu'on puisse en dire, c'est que le Gouvernement ne leur simplifie pas la tâche avec un texte aussi mal ficelé, texte que le Président de la République lui-même ne soutient que fort mollement : allez y comprendre quelque chose...

 

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(*) Oui : 10 codes ! Code Civil, bien sûr mais aussi Code de l'Action Sociale et des Familles, Code de la Défense, Code Général des Impôts, Code de Justice militaire, Code des Pensions civiles et militaires, Code de Procédure pénale, Code de Sécurité Sociale, Code des Transports, Code du Travail. On ne peut exclure que les parlementaires en rajoutent quelques-uns...

 

Publié dans on en parle partout

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