Pourquoi je voterai Sarkozy au 1er tour
Après l'officialisation cette semaine de la candidature de Nicolas Sarkozy et le retrait de la candidature d'Hervé Morin, je crois utile de préciser ce que sera mon vote à l'élection présidentielle et sur quoi il se fonde.
D'abord un rappel : je viens de l'UDF, c'est-à-dire de cette famille centriste historiquement alliée à la droite, de "centre droit", pour faire simple. Une famille dont la loyauté, quoi qu'on en dise, n'a jamais été prise en défaut dans son alliance avec la droite.
Le retrait annoncé de la candidature d'Hervé Morin passe mal chez moi : je veux bien (j'en ai, hélas l'habitude...) voter par raison et par élimination au second tour, mais j'aspirais à pouvoir exprimer au premier tour un vote d'adhésion, d'enthousiasme, de conviction positive : tel était le sens de mon soutien à Morin.
Hervé Morin parti, comment ne pas s'interroger sur les raisons qui nous ont amenés à être ainsi absents du premier tour de la Présidentielle ? Je crois que nous sommes les principaux responsables de notre sort : à force d'affirmer dans les faits notre loyauté à la majorité présentielle, nous avons fini par abandonner une part de notre liberté de ton, de pensée et d'action. Nous avons préféré, aussi, préserver quelques amis au Gouvernement plutôt que de prendre le risque de peser dans les sujets où nous aurions dû cultiver notre différence et ils n'ont pas manqué : nous aurions eu quelque légitimité à le faire, compte-tenu de ce que nous en disaient les Français. Je m'en souviendrai.
Hervé Morin ayant retiré sa candidature, quel choix me reste-t-il ? Trois :
- soit voter Sarkozy,
- soit voter Bayrou,
- soit aller à la pêche…
Première solution : Voter Bayrou
Le « ni droite ni gauche » de François Bayrou montre toutes ses limites : d’une déclaration à l’autre, Bayrou tente de se maintenir à équidistance des deux camps, comme si la logique bipolaire (pas au sens médical... quoique !) de notre système électoral n’existait pas. On le sent bien : François Bayrou ne se déterminera que… le soir du 1er tour, parce que son unique espérance –et sa seule chance de victoire- est de rassembler alors le camp du perdant quel que soit ce perdant. Car François Bayrou est indifféremment prêt à s'allier à Hollande contre Sarkozy ou à Sarkozy contre Hollande, en fonction des scénarios. Pas moi ! Je fais une différence entre Sarkozy et Hollande...
Et c'est une raison suffisante pour que je laisse à d'autres le vote Bayrou. Je regrette sérieusement qu'à force de se vouloir gaullien et solitaire, Bayrou ait préféré se concentrer jusqu'à l'obsession sur sa strategie personnelle dans cette présidentielle plutôt qu'au rassemblement des centres. Tant pis. Dommage…
Deuxième choix possible : l’abstention.
Franchement, j’étais prêt à m’y résoudre, pour la première fois en 32 ans de vie citoyenne. Je l’ai d’ailleurs annoncé à plusieurs reprises en bureau départemental du Nouveau Centre. Il faut dire qu'en 25 ans de militantisme au centre, le candidat pour qui j'ai voté au premier tour n'a jamais été élu : Bayrou en 2007 et déja en 2002 (ca va faire trois fois cette année et ça contribue à me faire penser que c'est trop tard pour lui), Balladur en 1995 et Barre en 1988. Je m'étais certes fait à l'idée que 2012 ne serait encore pas l'année du Centre, mais j'espérais, au moins, pouvoir soutenir au premier tour le candidat de mon coeur, celui qui portait mes valeurs.
Franchement, quand j'ai compris qu'Herve Morin était contraint au renoncement, oui, j'ai très sérieusement envisagé l'abstention au premier tour avant, une fois de plus, de me raisonner : il n'est pas concevable de jouer l'autruche dans un scrutin de cette importance où les chances de victoire de François Hollande ne sont pas minces à ce jour.
Reste un troisième choix : voter Sarkozy
Sarkozy sera-t-il réélu ? Je n’en sais rien. J’entends ce que les Français en disent et en pensent aujourd’hui, ce qui ne m'incite guère à l'optimisme. Mais je sais aussi qu’une campagne électorale est un temps où les opinions se construisent puis se cristallisent.
Peut-il aujourd’hui rattraper son retard dans les sondages ? Je crois qu’il pourrait le faire, même si ses premières déclarations et encore son meeting d'aujourd'hui à Marseille ne me semblent pas prendre le bon chemin. Le discours de 2007, qui nous est peu ou prou resservi, avaient des vertus qui se sont quelque peu érodées à l'épreuve du pouvoir...
En tout cas, malgré mes objections, malgré mes réticences sur les comportements de l’homme et sur certains aspects de son programme, c’est bien avec cette famille conservatrice que nous avons choisi d’avancer depuis 40 ans. Cette alliance a connu des hauts et des bas mais les deux familles étaient gagnantes à chaque fois qu'elles se trouvaient dans un rapport de force équilibré.
Là est notre maison, là est notre histoire, là est, sans doute, notre avenir, pourvu que nous sachions y reprendre notre place.
D'ailleurs, que Sarkozy soit ou non réélu, la recomposition de la droite et du centre débutera dès le lendemain de l'élection législative et je veux croire qu'il y a là un chemin pour le Centre
auquel nous devons nous consacrer désormais.
C’est donc en pensant à ce courant centriste que j’ai fait le choix de voter Sarkozy dès le premier tour. Pour être honnête, je vais voter Sarkozy en pensant surtout à Juppé, à Raffarin, à Fillon, bref à tous ceux qui, au sein de l'UMP, incarnent, plus que Sarkozy, cette majorité que je souhaite voir gouverner demain. Raffarin appelle Sarkozy, après un premier quinquennat "à droite" a, enfin, "rouler au centre" pendant son second mandat ? Que le ciel l'entende...
Ce ralliement à Sarkozy dès le premier tour est un pas, un geste, qui en appelle un autre : celui du rassemblement de l’UMP et du Nouveau Centre autour de candidats communs aux législatives qui suivront l’élection présidentielle. Sarkozy a voulu des candidats uniques au premier tour ? Et bien, allons-y !
Jean Dionis ayant clairement exprimé cette fin de semaine son soutien à Sarkozy dès le premier tour, j’appelle donc Christine Bonfanti à concentrer son énergie à l’exercice de son mandat de Maire de Lafox et de membre du bureau de la Communauté d’agglomération d’Agen et à renoncer à sa candidature aux législatives qui, du coup, perd tout son sens : pourquoi un candidat UMP face au député sortant membre à part entière de la majorité présidentielle et appelant à voter Sarkozy ? Personne ne le comprendrait...
Au-delà de cette logique de rassemblement, je reconnais volontiers, comme je l'ai fait tout au long du mandat ici même, que Sarkozy a été un Président qui a su faire des choses. C'est un Président qui a eu le courage de mener des réformes dans un environnement économique extraordinairement compliqué. Je ne lui en veux pas que cet environnement ait pesé sur certains de ses engagements de campagne de 2007 : qui aurait fait mieux avec la crise bancaire de 2008 ? Les crises de l'endettement public en 2009 ? Les difficultés de financement de 2011 ?
Mais son comportement personnel et politique pendant cinq ans m'a trop souvent laissé sur ma faim. C'est pourquoi, au moment d'exprimer mon vote, je veux rappeler ici quelques idées auxquelles je crois :
- J’attends du chef de l’Etat une posture de courage, certes, mais aussi de rassemblement des Français, de mise en mouvement collectif et pas un discours qui stigmatise, qui pointe du doigt et qui, au final, exclue des Français ou les monte les uns contre les autres.
- J’attends du Président de la République qu’il ait le souci d’une répartition plus juste des efforts à consentir demain.
- J’attends du Président de la République qu’il entende la détresse de ces familles travaillantes qui ne s’en sortent plus et qui perdent non seulement l’espoir, mais aussi la dignité de leur autonomie.
- J’attends du Président de la République qu’il considère les chômeurs, les fonctionnaires ou les étrangers comme des citoyens de plein exercice. Qu'il entende Raffarin, qui nous rappelle à tous notre fraternite !
- J’attends du Président de la République qu’il incite réellement celles et ceux qui travaillent à jouir du fruit de leurs efforts, au lieu de les ponctionner toujours plus. Ceux-là sont trop riches pour avoir besoin d’être aidés, mais pas assez pour se payer des sociétés spécialisées dans l’évasion fiscale.
- J’attends du Président de la République qu’il réforme ce vieux pays qu’est la France, et je sais que c’est difficile. Mais j’attends qu’il le fasse avec un souci de justice et d’efficacité qui a douloureusement fait défaut ces dernières années.
- J’attends enfin de lui qu’au-delà du couple franco-allemand dont je connais l’importance, la France soit capable de parler à tous les pays membres de la zone euro, pour construire avec eux, au lieu de distribuer les bons et les mauvais points. Comme si nous étions en position de donner des leçons, avec notre endettement, nos chiffres désastreux du commerce extérieur ou l’envolée du chômage ! Qui peut ainsi penser que l'abaissement de la Grèce puisse aboutir demain à son bonheur et au nôtre ?
C'est en pensant à tout ça, et faute d’un candidat qui porte mes valeurs, que je voterai donc Sarkozy au premier tour..
Mon espoir, je le place au Centre plus que jamais, et à ses élus dont je souhaite qu’ils soient le plus nombreux possible à l’Assemblée et au Gouvernement pour peser demain et infléchir une action gouvernementale qui, sans eux, manquerait d’humanité, d’esprit de justice et de sens de la cohésion nationale.
C’est donc, de manière un peu paradoxale j'en conviens, en pensant au Centre et à la place qu’il doit reconquérir dans la nouvelle majorité que je voterai Sarkozy et que j'appelle tous ceux qui se reconnaissent dans le projet humaniste, tolérant et courageux du Centre à en faire de même.