Ronchonnons un peu ensemble...
Je suis frappé de constater, dans ma vie d'élu, mais aussi dans ma vie personnelle ou professionnelle à quel point nous sommes devenus... mal élevés ! Pas éduqués du tout serait d'ailleurs sans doute plus juste, quand on y réfléchit. Petit florilège de ces comportements incivils, glânés au fil de ma propre expérience : chacun pourra à loisir la compléter sans doute...
Baptême républicain ? Pas là !
Les communes qui le veulent bien peuvent recevoir en Mairie parents, enfant et "parrain-marraine" pour enregistrer, sans force juridique, l'engagement des uns et des autres au cours d'un baptême "civil" ou "républicain" : on est donc vraiment là dans une démarche volontaire des familles. Le 10 août dernier, lors du premier des trois baptêmes que je devais célébrer ce matin-là, j'étais, en costume-cravate (30°C à l'ombre), ruban tricolore autour du cou, fonctionnaire municipal en heures supp à mes côtés, l'arme au pied, à attendre le premier baptême : personne n'est venu ! Croyez-vous que quelqu'un a pris la peine de faire un saut à la Mairie pour expliquer que la cérémonie était annulée ? Rien. Rien non plus le lundi... Je suis passé directement, une demi-heure plus tard, au second baptême qui, lui, était là.
Pourquoi se gêner : "ils" sont là pour ça, non ?
Ces fleurs sont payées avec mes impôts, non ?
C'est une histoire ancienne vue de mes yeux et je sais qu'elle se répète (trop) souvent : un jardinier municipal plantait consciencieusement des fleurs dans les bacs prévus à cet effet Boulevard Carnot. A un moment, pour mesurer l'effet, l'employé se retourne et découvre... une petite mamie qui, avec la même constance, arrachait les fleurs et les mettait dans son sac ! Pas gênée la grand-mère qui s'est même offusquée de la remarque, pourtant courtoise, de l'employé municipal.
Il n'y a pas que les jeunes qui sont mal élevés...
Un grand classique : les poubelles
En centre-ville, 6 fois par semaine, les ordures ménagères sont ramassées le soir devant votre domicile. Difficile de faire mieux... Et pourtant, tous les jours, d'autres camions sont obligés de tourner dans la ville pour ramasser les sacs déposés après la collecte. Si ces camions ne passaient pas, la ville ressemblerait à une porcherie. Mais comme ils passent, les dépôts sauvages continuent !
Pourquoi se gêner ?
Autre grand classique : les crottes de chien
Ce n'est pas simple tous les jours d'avoir un chien en ville (vous me direz qu'on n'oblige personne à en avoir un non plus...) Un chien, ça fait caca et pas toujours où on lui demande. Mais, dans ce cas, on ramasse. Si ça vous dégoûte, cessez d'avoir un chien. Malgré tous nos efforts, les PV, les équipes de nettoyage, les canisites, les motocrottes, les sachets ramasse-crottes gratuits, je pense qu'on pourrait mettre en permanence des divisions d'employés municipaux dans les rues que ça n'y suffirait pas : la ville est constellée de déjections du matin au soir. Et c'est la faute à la mairie, bien sûr...
Ben quoi, c'est naturel, non ?
Je réserve mais je ne viens pas
Tous les restaurateurs vous le diront : ils ont toutes les semaines des clients qui appellent pour réserver... et qui ne viennent pas, sans un mot d'explication ni d'excuse. C'est devenu un grand classique au point que ces professionnels, parfois, insistent lourdement auprès de leurs correspondants, au risque de vexer ceux qui, de bonne fois, veulent vraiment réserver ! Il parait que les médecins eux-mêmes, exaspérés de ces lapins répétés, envisagent de faire payer les consultations annulées au dernier moment.
Juste une fois. Pas grave...
T'aime pas ma musique ?
Ah, ces délicieux automobilistes qui font marcher leur autoradio comme s'il s'agissait de sonoriser le parc des expos ! Un vrai délice, d'autant que ces mélomanes, jeunes la plupart du temps, ont un fâcheux penchant pour les musiques très sonores, plutôt Metallica ou Akhenaton que Trenet ou Chopin. Quand ils ne font que passer dans la rue, c'est un moindre mal, mais quand ils stationnent sous vos fenêtres... Et, évidemment, c'est beaucoup plus amusant la nuit que le jour.
J'ai vingt ans et je t'emmerde (titre d'un spectacle des Baladins)
Je bosse, moi !
Vous circulez en voiture et vous tombez sur un véhicule garé à peu n'importe comment et qui bloque la circulation. A partir de là, plusieurs scénarios sont possibles : une dame très-comme-il-faut est au téléphone et s'indigne qu'on la dérange en pleine conversation. Ou alors, c'est le livreur qui vous explique que, lui, il travaille compris ? Ou encore, la version agressive "kestatoa ?", avec ou sans casquette. Nous avons tous vécu ça, n'est-ce pas ? Point commun à tous ces scénarios : toi qui arrives en voiture et qui voudrais passer, tu attends et tu fermes ta g... Sinon, tu bascules, à ton tour, de l'autre côté du miroir et le ton monte.
J'en ai seulement pour une minute...
Avons-nous perdu toute éducation ?
Sommes-nous devenus à ce point insensibles au respect des autres, de leur travail, de leur personne ? Et si oui, comment en sommes-nous arrivés là ? Comment avons-nous élevé nos propres enfants ? Comment pouvons-nous (ça nous arrive aussi...) être devenus à ce point intolérants et asociaux ?
Est-ce que tout ça est grave ? Non, bien sûr. Il y a tous les jours des évènements infiniments plus importants et plus dramatiques qui se produisent. Mais ce sentiment que les règles simples de vie commune sont de moins en moins respectées nous exaspère et nous inquiète. Question d'éducation ou bien mutation d'une société dans laquelle, comme le dit Michel Serres, il y a désormais autant d'émetteurs d'info et de règles que de récepteurs ?
C'était ma petite minute "Père Ronchon"...