Qui a voté pour cette (absurde) nouvelle Aquitaine ?
Je profite de la trêve estivale pour regarder d'un peu plus près dans quelles conditions a été acquis le vote du 23 juillet dernier, par lequel l'Assemblée nationale a notamment décidé de fusionner l'Aquitaine avec Poitou-Charentes et le Limousin.
Ce vote a été largement acquis puisqu'au total, 261 députés ont voté "pour", 205 "contre" et 85 se sont "volontairement" abstenus, ce qui laisse environ 25 députés qui "involontairement" (?) se sont abstenus.
Quelle a été l'attitude des députés d'Aquitaine dans ce vote ?
Notre région compte 28 députés. 23 d'entre eux sont socialistes, 2 sont UMP, 2 sont écolos et 1 (Jean Lassalle) est non inscrit.
Sur ces 28 députés aquitains, 15 ont voté le texte, 4 s'y sont opposés, 7 se sont abstenus "volontairement" et 2 n'ont pas pris part au vote (les députées socialistes Lucette Lousteau du Lot-et-Garonne et Colette Anglade de Dordogne).
Si l'on considère les seuls 23 députés PS d'Aquitaine, 15 d'entre eux ont voté pour la fusion Aquitaine/Limousin/Poitou-Charentes, 2 ont voté "contre" (David Habib - 64 et H. Emmanuelli - 40) et 4 se sont abstenus (C. Capdevielle, N. Chabannes et M. Lignieres-Cassou des PA et J.P. Dufau des Landes).
Signalons aussi les vote "contre" de J. Lassalle (NI - 64) et d'Yves Foulon (UMP - 33) ainsi que l'abstention de J.L. Costes (UMP - 47).
Soulignons en outre que les députés girondins se sont massivement prononcés en faveur du texte (10 sur 12), les députés N. Mamère (ECO - abstention) et Y. Foulon (UMP - contre) étant les seuls à s'être démarqués dans le département de la métropole girondine.
Signalons enfin la particularité du vote très éclaté des députés landais (3 PS mais 1 "pour", 1 "contre" et 1 abstention...) et de leurs collègues des Pyrénées Atlantiques (5 députés PS sur 6 : 1 seul a voté "pour", 1 "contre" et les 3 autres se sont abstenus).
Voilà pour les chiffres dont le détail pourra être trouvé sur le site de l'Assemblée Nationale (http://www.assemblee-nationale.fr/14/scrutins/jo0898.asp).
Que retenir de ces chiffres du scrutin ?
La sur-représentation du PS de Gironde
D'abord qu'avec 23 députés PS sur 28, notre région est assez curieusement représentée à l'Assemblée Nationale ! Certes, l'Aquitaine vote plutôt à gauche, mais une telle sur-représentation du PS donne raison à tous ceux qui réclament qu'une part de proportionnelle soit introduite dans la désignation des députés...
On peut ensuite souligner que les députés girondins ont massivement soutenu ce découpage alors que les départements "périphériques", eux, ont marqué plus de distance. Si j'en juge par les échanges que j'ai eus avec certains acteurs de cette réforme, là est bien le problème : depuis Paris, cette fusion a été perçue comme positive sous l'influence des députés girondins et les seules oppositions qui se sont exprimées venaient de départements "frontaliers" ce qui, dans l'esprit de mes interlocuteurs, signifiait "secondaires".
Le pompon de ce mépris girondin pour le reste de la région pourrait sans doute être attribué à Gilles Savary, député PS, qui m'écrit, alors que je m'insurgeais contre cette vision outrancièrement métropolitaine : " il est normal qu'ici et ailleurs (!), les marges des futures grandes régions se sentent marginalisées ! Mais n'ayez crainte , il n'y aura pas de postes frontières ! ". Difficile de faire une réponse plus sotte et plus méprisante...
Seule aura compté la voix de la métropole...
Ce qui illustre hélas la considération portée par l'Aquitaine actuelle à l'égard de ces territoires frontières et augure bien mal de ce qu'il en sera dans une Aquitaine ainsi étendue au nord vers Poitou-Charentes et Limousin. Si les nouveaux arrivants savaient à quel point les élus régionaux méprisent les départements "frontières"...
Entre logique partisane et timidité périphérique...
Seulement 2 députés PS seulement auront osé s'opposer...Grâce soit rendue à Henri Emmanuelli et David Habib ! Mais ils auront été bien seuls à oser cette marque d’indépendance. 4 autres députés socialistes les ont (presque) rejoint en s'abstenant. Mais pas un seul en Gironde, pas un seul en Dordogne et pas un seul en Lot et Garonne (sauf à considérer l'absence lors du vote de L. Lousteau comme un geste politique). Comment voulez-vous, avec de tels soldats gagner la bataille ?!
L'offensive charentaise
A côté de nos timides et bien disciplinés députés aquitains, les élus charentais, eux, ont su se mobiliser au-delà des partis, montant au créneau dans les médias, exerçant un intelligent travail de lobbying, monopolisant l'attention du gouvernement. Qui a entendu parler de l'éventuelle fusion Aquitaine/Midi Pyrénées ? Personne ou presque...
Et maintenant ?
Le parlement va être de nouveau saisi à l'automne, pour une seconde lecture, de ce projet de découpage. Entre-temps, interviendra le renouvellement pour moitié des sénateurs. Le probable changement de majorité qui en découlera permettra-t-il de remettre sur le métier l'ouvrage d'une vraie région Aquitaine ? Je l'espère.
Mais le dernier mot restera néanmoins à l'Assemblée nationale et il faudra que les députés aquitains manifestent plus d'énergie pour inverser la donne. Sans cela, l'absurde future Aquitaine verra le jour et nous devrons vivre avec ce découpage stupide, et pour longtemps...